lundi 27 octobre 2014

Sapin révise les hypothèses pour se conformer au Pacte de Stabilité

Contrairement à ce que les titres de presse indiquent, aucune nouvelle mesure de réduction du déficit n'a été annoncée, seulement une révision des hypothèses qui déterminent le budget. Finalement, c'était la meilleure chose à faire pour éviter d'introduire de la pro-cyclicité dans la règle budgétaire, et permettre à nos partenaires européens de valider le budget sans décrédibiliser le Pacte de Stabilité. 

Mais on se demande quand même pourquoi le gouvernement a choisi de réviser à la baisse la croissance potentielle entre avril et octobre (lien). Sans cette révision, on aurait pu éviter tout ce psychodrame. 


vendredi 24 octobre 2014

Sondage: effet redistributif des politiques publiques

Dans ce sondage, on vous demande de classer suivant un axe gauche/droite les différentes réformes proposées, selon leur impact sur le pouvoir d'achat des différents ménages (aisés, démunis, classe moyenne...). Cela ne tient évidemment pas compte d'autres dimensions. 

Le but est de vérifier s'il y a un lien entre volonté de redistribution et positionnement gauche/droite, et si oui lequel? 


Les résultats seront analysés ici plus tard. Ce sondage n'ambitionne nullement d'être représentatif, vous pouvez le transférer à vos amis. 





vendredi 17 octobre 2014

The single most powerful argument for granting an extension to France and Italy


"To summarize it, here is what it says:
  1. A recession triggers a reduction of the potential growth rate  (the maximum rate at which the economy can grow without overheating) because ofhysteresis: unemployed workers lose skills and/or exit the labour market, and firms scrap productive processes and postpone investment. I would add to this that hysteresis is non linear: the effect, for example on labour market participation, of a slowdown, is much larger if it happens at the fifth year of the crisis than at the first one.
  2. According to the Commission’s own estimates Italy’s potential growth rate dropped from 1.4% on average in the 15 years prior to the crisis (very low for even European standards), to an average of -0.2% between 2008 and 2013. A very large drop indeed.
  3. (Here it becomes interesting). The box in the Italian plan argues that we have two possible cases:
    1. Either the extent of the drop is over-estimated, most probably as the result of the statistical techniques the Commission uses to estimate the potential. But, if potential growth is larger than estimated, then the output gap, the difference between actual and potential growth is also larger.
    2. As an alternative, the estimated drop is correct, but this means that Italy there is a huge hysteresis effect. A recession is not only, as we can see every day, costly in the short run; but, even more worryingly, it quickly disrupts the economic structure of the country, thus hampering its capacity to grow in the medium and long run.
The box does not say it explicitly (it remains an official government document after all), but the conclusion is obvious: either way the Commission had it wrong. If case A is true, then the stagnation we observed in the past few years was not structural but cyclical. This means that the Italian deficit was mainly cyclical (due to the large output gap), and as such did (and does) not need to be curbed. The best way to reabsorb cyclical deficit is to restart growth, through temporary support to aggregate demand. If case B is true, then insisting on fiscal consolidation since 2011 was borderline criminal. When a crisis risks quickly disrupting the long run potential of the economy, then it is a duty of the government to do whatever it takes to fight, in order to avoid that it becomes structural."

I'm sure Commission economists know that, but their bosses?

mercredi 15 octobre 2014

De la souplesse des règles budgétaires européennes

J'ai déjà expliqué ici pourquoi les règles budgétaires européennes sont beaucoup plus souples qu'on ne le pense. Elles sont conçues pour éviter la pro-cyclicité, et le calcul de l'effort structurel repose sur des hypothèses de croissance potentielle qui ont vocation à être stables dans le temps.

À cette lumière il est difficile de comprendre pourquoi le gouvernement cherche l'affrontement avec la Commission, puisqu'il aurait été tout aussi simple de ne pas réviser à la baisse la croissance potentielle pour faire apparaître un effort structurel acceptable pour Bruxelles.

Le seul résultat est de faire voler en éclat ces règles budgétaires, qui, si on les maîtrise, sont pourtant assez souples en période de crise pour permettre à l'Etat de jouer son rôle stabilisateur, et assez contraignantes en période faste pour forcer le gouvernement à réduire sa dette en prévision de la prochaine crise. 

Voilà l'article que je souhaitais écrire aujourd'hui, mais Xavier Timbeau m'a devancé ici. Extraits :
"(...)

C’est ici que le projet de budget 2015 matérialise l’infraction au traité. L’effort en 2014 n’est plus que de 0,1 point et est annoncé à 0,2 point en 2015. Ces chiffres sont ainsi inacceptables par la Commission. Comment expliquer cette modification provocatrice ? Plusieurs éléments y concourent. Le premier est une modification de la norme de comptabilisation du CICE qui conduit à inscrire en 2015 les dépenses générées en 2015 et payées en 2016. Au moment où le CICE monte en charge, c’est 0,2 point de PIB en moins dans l’effort budgétaire français. Le second est une modification de l’hypothèse de croissance potentielle. Au lieu de 1,5% de croissance potentielle dans le programme de stabilité 2014-2017, celle-ci est supposée être de 1,2% sur la période 2014- 2017. A méthode constante, l’effort en 2014 aurait été de 0,5 point du PIB et de 0,6 point en 2015. La différence avec le programme de stabilité d’avril 2014 s’explique par la révision à la baisse de l’inflation et par quelques modifications sur les mesures. La nouvelle présentation du même budget, avec une modification marginale du contexte économique, est celle d’une absence d’effort structurel. Non seulement l’objectif nominal ne sera pas atteint, mais en plus l’effort structurel de 2014 et de 2015 est abandonné. Et ce, à politique inchangée ! Pire, ce projet de budget laisse entendre que l’objectif nominal n’est pas atteint parce que l’effort structurel n’a pas été réalisé en 2014 et ne le sera pas en 2015.

Pourtant le gouvernement plaide les circonstances exceptionnelles. Pourquoi avoir modifié les hypothèses de croissance potentielle et n’avoir pas conservé la norme comptable antérieure pour présenter le projet de budget français 2015 ? Un effort de 0,6 point du PIB en 2015 au lieu d’un effort précédemment annoncé de 0,8 point du PIB n’aurait pas posé de problème à la Commission, qui aurait relevé des hypothèses trop hautes de croissance potentielle (comme d’ailleurs dans ses remarques sur le projet de budget 2014, que le Conseil n’a pas retenu en novembre 2013). Il aurait été simple de répondre que l’on ne change pas des hypothèses de croissance potentielle tous les 6 mois et que c’est d’ailleurs l’objet de ce concept et la raison de son introduction dans les traités et les règles européennes : éviter la pro-cyclicité des politiques budgétaires, éviter de faire plus de restriction budgétaire au moment où les mauvaises nouvelles s’amoncellent. Il aurait été acquis que la Commission a une appréciation plus basse que la France, mais la croissance potentielle est non observée et son évaluation repose sur de nombreuses hypothèses. Ainsi, il n’est pas précisé dans les traités ou les règlements si l’on considère une croissance potentielle à court terme ou à moyen terme. Or la Commission estime (dans le 2012 Ageing Report) que la croissance potentielle à moyen terme de la France est de 1,7% par an (en moyenne de 2010 à 2060) et de 1,4% en 2015. Et surtout, rien n’oblige la France à adopter l’hypothèse de la Commission. Le règlement EU 473/2011 demande que les hypothèses soient explicitées et qu’éventuellement des opinions extérieures soient demandées. 
(...)
Il est impossible de justifier la présentation faite : la Commission réprimandera la France, qui ne réagira pas, sûre de son droit (et comme l’a déjà annoncé son gouvernement). La Commission devra alors monter l’échelle des sanctions et il est peu probable que le Conseil l’arrête en route, d’autant que les décisions y seront prises à la majorité qualifiée inversée. Le French bashing prendra un nouveau tour et ceci ne fera apparaître que l’inutilité du processus, puisque la France ne changera rien à sa trajectoire de finances publiques. Cela dépréciera la parole et l’influence française au moment où s’élabore l’initiative d’un plan d’investissement de 300 milliards d’euros qui n’est voulu que par la France et la Pologne (d’après la rumeur), au risque de faire capoter une des rares initiatives qui pouvait nous faire sortir de la crise.

(...)

La France pourrait revoir son projet de budget et ajouter des mesures, qui dans la nouvelle méthode comptable et avec une hypothèse plus basse de potentiel, lui permettent de tenir son engagement d’effort structurel d’avril 2014. Ce scénario est très improbable et c’est une bonne chose (voir le post d’Henri Sterdyniak). Improbable, parce que les presque 2 points de TVA à taux plein nécessaires pour arriver à un effort de 0,8% du PIB (et donc sans compenser le retard pris en 2014) ne seraient pas votés par le Parlement français. Bonne chose, parce qu’ils auraient induit une récession (ou un sérieux ralentissement) en France et une montée du chômage totalement inacceptables pour simplement sauver la face de la Commission et appliquer avec diligence les textes européens.

Il aurait été bien plus habile de s’en tenir aux hypothèses (et méthodes) du programme de stabilité 2014. Le Haut Conseil aurait protesté, la Commission aurait querellé mais les règles de la gouvernance européenne auraient été sauves. On dit que les statistiques sont la forme la plus avancée du mensonge. Entre deux mensonges, autant choisir le moins stupide."

mardi 14 octobre 2014

Micro, macro : pas pareil

C'est tellement différent qu'obtenir un Prix Nobel dans l'un n'empêche pas de dire des bêtises sur l'autre :

"Pour l'instant, on a eu la chance de payer des taux d'intérêt extrêmement faibles, mais si les marchés commencent à douter de la France, les taux d'intérêt vont augmenter très vite et la charge de la dette va devenir très lourde", a-t-il notamment expliqué."
Les marchés des titres, pour les nuls: il y a deux types d'actifs, les dettes publiques à long terme et faible rendement, les obligations/actions privées à court terme et fort rendement. 

Si la demande s'effondre, les entreprises investissent moins, ce qui limite la demande de crédit. Les titres privés à bon rendement se raréfient, et les agents placent leur épargne dans de la dette publique à long terme en attendant des jours meilleurs, ce qui réduit le taux d'intérêt de la dette publique. Ce phénomène peut être renforcé par l'asymétrie d'information et la hausse de l'aversion au risque, ce qui réduit l'offre de crédit aux entreprises, et pousse les agents à préférer les bas de laine, et les banques à ne plus se faire mutuellement confiance. Donc première conclusion, il y a rationnement du crédit, via l'offre et via la demande. Deuxième conclusion les taux sur la dette baissent. 

La banque centrale va ensuite essayer de baisser les taux d'intérêt pour relancer la demande d'investissement des entreprises : si cela ne coûte pas cher de le financer, ça vaut peut être le coût de construire le deuxième entrepôt. Pour y parvenir elle va prêter à des taux très bas aux banques, ce qui leur permettra d'augmenter leur exposition à des actifs risqués et de court terme sans craindre de se retrouver à court de liquidité, ce qui a le mérite de jouer simultanément sur l'offre et la demande de crédit. 

Mais plusieurs contraintes pèsent sur l'action de la banque centrale. D'abord les taux d'intérêt peuvent ne jamais être assez bas pour relancer l'investissement. Auquel cas les banques ne trouvent pas de projet à financer, les liquidités offertes par la banque centrale ne sont jamais utilisées et l'épargne nationale reste investie en dette publique. 

Une solution possible est que la banque centrale prête directement, sans la marge des banques, de grosses sommes aux entreprises. La réussite de ce plan dépend de la structure du financement des entreprises : si elles émettent beaucoup d'obligations, il y a des actifs à acheter. Sinon, c'est difficile de se passer de l'intermédiaire bancaire. Une autre solution, c'est d'acheter tous les titres de dette publique, ce qui réduit encore plus son rendement, qui devient équivalent à celui de la monnaie. Cela donne une grosse incitation aux agents de financer les entreprises à bas coût, voir à taux réel négatif si l'inflation est non nulle. À un moment, il est probable que l'investissement reparte, mais cela peut nécessiter une augmentation considérable du bilan de la banque centrale. 

Enfin, la banque centrale agit en général comme prêteur de dernier recours, ce qui permet de rendre la dette publique très liquide, car on trouvera toujours un acheteur. 

Voilà le cadre d'analyse macro qui permet de réfléchir sur ce sujet. 

Pour que la menace de Tirole soit possible, il faut prendre en compte la structure particulière des dettes publiques en Europe. Un agent économique à le choix entre plusieurs titres de dette, classés par rendement selon leurs primes de risque respectives. Avec une seule dette, il n'y a pas le choix, il faut que l'argent aille quelque part. Avec plusieurs dettes, la substitution de l'une par l'autre est possible. C'est pourquoi une forte hausse de taux est possible en Europe, mais impossible aux USA (1). 

Dans la zone euro, les rendements à 10 ans s'étalent de 0,89% pour la dette allemande à 6,71% pour la dette grecque. La dette française est à 1,26%. Il est donc théoriquement possible que la dette française se retrouve en queue de peloton des dettes publiques européennes. Mais les fondamentaux économiques en France sont meilleurs que dans la majorité des pays européens, c'est un des rares pays à avoir dépassé le pic de PIB pré crise, et même avec un déficit un peu au dessus de la moyenne, personne ne doute de la capacité de la France à le réduire si nécessaire, puisqu'elle y est parvenue sans trop d'effort de 2009 à 2013. Et puis surtout, les circonstances qui conduiraient la France à s'effondrer au point qu'on puisse douter de sa capacité à rembourser sa dette sont des circonstances où le reste de la zone euro est entraînée avec elle. En somme, il y a peu de chance que le classement des risques souverains change radicalement, les pays européens sont enchaînés les uns aux autres, et la France est au milieu.  

En outre il y a d'autres raisons de critiquer la menace de Tirole. 

D'abord il ne précise pas d'où doit venir l'attaque. Si la dette française est abandonnée au profit d'un actif en devise, cela ne conduira à rien d'autre que la baisse de l'euro, ce qui serait considéré comme une bonne nouvelle pour l'économie européenne, et française en particulier compte tenu de la forte élasticité au taux de change de ses exportations. 

Ensuite, il néglige complètement l'action de la BCE (c'est courant chez les microéconomistes d'ignorer la politique monétaire, et plus généralement de raisonner en équilibre partiel). Comme on l'a vu ci-dessus, la politique monétaire tend à réduire encore plus la moyenne des taux souverains, et à réduire la dispersion autour de la moyenne via le rôle de prêteur de dernier recours. Donc même si la France se retrouve par magie en queue de peloton, ça ne sera pas très loin de la moyenne, et les taux n'exploseront pas. 

Bref, la prédiction de Tirole ne peut se réaliser que sous trois conditions :

1) La dette française devient magiquement la plus risquée d'Europe sans aggraver la crise dans le reste de la zone euro. 

2) La banque centrale abandonne son rôle de prêteur de dernier recours.

3) La hausse des taux est suffisante pour augmenter le déficit de façon insoutenable au point que le risque de défaut devient possible et tentant. Ce qui est tordu pour un État en déficit primaire, qui devra se financer par la dette même après un défaut. 

4) Les investisseurs se convainquent simultanément de 1, 2 et 3 et vendent avant que le défaut n'arrive, ce qui le provoque. 

Je ne dis pas que c'est rigoureusement impossible. Mais bon. 

(1) : et c'est pourquoi la fin du QE ne se traduit pas par une hausse forte des taux souverains aux USA. 








mardi 7 octobre 2014

La croissance est-elle l'ennemie du climat? (Épisode 3)

Update : la discussion se poursuit en commentaire. 

Pour résumer, le système économique interagit avec la nature lorsqu’il utilise les ressources naturelles et émet des déchets. On peut ramener le cas des déchets à l’utilisation d’une ressource naturelle (l’eau propre, l’air non saturé en CO2, la terre sans déchets radioactifs…), ce qui nous conduit à l’équation d’évolution du stock d’une ressource R donnée :

Rt+1 = Rt - ut.Yt + J

Où Y est le PIB, J le renouvellement de R (peut dépendre de R, mais en général non), et u le taux auquel la ressource R est utilisée pour produire Y.

A long terme, Y croît au rythme de la population et du progrès technique. Pour éviter que le stock de ressources ne diminue drastiquement, il faut d’abord réussir à ce que l’utilisation soit inférieure au renouvellement lors d’une période T donnée, si possible proche dans le temps: uT .YT < J.

A partir de cette période T, le PIB mondial peut croître, à condition que le taux d’utilisation des ressources naturelles diminue d’autant. Cela n’est possible que par l’innovation technologique, ou la substitution d’une ressource naturelle par une autre qui se renouvelle plus vite.

Dans la réalité, que se passe-t-il ? Le graphique 1 montre l’évolution depuis 1990 du PIB et des émissions de CO2 par tête, des émissions totales, et le ratio u appliqué à la ressource naturelle « air propre », c’est-à-dire l’utilisation de l’air (=les émissions de CO2) sur le PIB.




On constate que bien que le PIB/hab (en standard de pouvoir d’achat) a été multiplié par presque 2.5 en 20 ans, les émissions par tête n’ont augmenté que de 14%. Les émissions totales ont en revanche augmenté de 50% car la population a augmenté. L’intensité avec laquelle la ressource « air propre » est utilisée pour créer de la valeur a quant à elle été divisée par deux. Cela montre bien qu’il peut y avoir création de richesse sans nécessairement utiliser plus de ressources. L’augmentation totale des émissions est pour 2/3 liée à l’augmentation de la population, et pour 1/3 liée à l’augmentation des émissions par tête, qui seules peuvent être reliées à la croissance du PIB par tête.

Dans le graphique 2 ci-dessous, qui compare pour tous les pays du monde leur contribution au taux de croissance mondial des émissions et leur contribution au taux de croissance mondial du PIB en services, on voit d'ailleurs qu’il n’y a aucun lien entre cette création de richesse et les causes du réchauffement climatique. En revanche, même pour les pays de l’OCDE, il existe toujours un lien fort entre le taux de croissance du PIB total et les émissions (graphique 3) qui s’explique par le fait qu’une part non négligeable de la croissance des pays de l’OCDE provient encore de l’augmentation de la production industrielle.




Il ne faut donc pas s’opposer à la croissance du PIB en elle-même, mais au maintien du statu quo qui exige d'abord que la production industrielle soit intensive en ressources naturelles très peu renouvelables comme l’air qui nous entoure et le pétrole sous nos pieds, et ensuite que l'essentiel de la création de richesse au niveau mondial provienne de cette production industrielle. Il faut réduire cette intensité car il sera difficile de s’opposer à la croissance des pays en développement, qui passera probablement du primaire (agriculture) au secondaire (industrie) avant de se tertiariser, mais cela ne signifie pas non plus la fin de la croissance dans les pays développés. En effet, la croissance totale dans un pays comme la France provient de la croissance du volume de la production industrielle et de la croissance du volume des services, chacun pondéré par leurs prix respectifs. Comme le prix des biens industriels baisse tendanciellement, une part de plus en plus importante de la croissance provient des services, et le revenu national sera déconnecté du volume de la production industrielle. Le débat qui oppose croissance et climat a donc vocation à s’éteindre. 


En revanche, le premier graphique montre bien que la transition énergétique n’est pas acquise, que même si la croissance du PIB est de plus en plus déconnectée des émissions, ces dernières augmentent toujours, loin de l’objectif de division par deux d’ici 2050 nécessaire pour ralentir le réchauffement climatique. Si les politiques décident de continuer à jouer la montre, il est probable que la transition soit trop lente pour éviter la catastrophe. Le but de cette trilogie étant d'expliquer qu'il est erroné de présenter le problème comme un choix entre notre niveau de développement et la sauvegarde de la planète, ce que beaucoup de décroissants et de climato-sceptiques pensent. 

Francesco Saraceno on European Policy Makers


"This is terrible for European policy makers. They completely lost control over their discourse, whose inconsistency is constantly exposed whenever they speak publicly. I just had a first hand example yesterday, listening at the speech of French Finance Minister Michel Sapin at the Columbia Center for Global Governance conference on the role of the State (more on that in the near future): he was able to argue, in the time span of 4-5 minutes, that (a) the problem is aggregate demand, and that (b) France is doing the right thing as witnessed by the halving of structural deficits since 2012. How (a) can go with (b), was left for the startled audience to figure out.
Terrible for European policy makers, I said. But maybe not for the European economy. Who knows, this blatant contradiction may sometimes lead to adapting the discourse, and to advocate solutions to the deflationary threat that are consistent with the post Jackson Hole consensus. Maybe. Or maybe not."