Vu dans cet article des échos suite à une étude du cabinet AT Kearney sur le secteur de la High Tech en Europe (lien)
"La high-tech européenne poursuit son lent déclin (...) seuls 8 groupes européens (après la session de Nokia) figurent désormais dans le classement des 100 premiers groupes high-tech dans le monde"
Je n'ai jamais compris pourquoi :
1) On associait toujours dynamisme d'un secteur et dynamisme des grosses entreprises de ce secteur. Dans l'aéronautique cela peut se justifier, en raison de rendements d'échelle croissants, il faut être gros pour produire à la chaîne des avions, et le dynamisme d'Airbus entraîne le secteur des fournisseurs d'Airbus. Mais dans la high-tech, cela ne se justifie pas forcément. On n'a pas nécessairement besoin d'être un gros acteur pour fournir un produit fini, au consommateur (google, apple...) ou aux entreprises des autres secteurs (logiciels...). D'ailleurs, si on regarde les acteurs par type de high-tech, (lien), les "autres entreprises" représentent entre 15% et 40% des parts de marché.
2) La nationalité des actionnaires d'une multinationale avait son importance. Ce qui compte pour l'emploi et la croissance, c'est où elle est installée, donc si Nokia reste en Europe, tant mieux. Ensuite, ce sont les mêmes qui d'un côté s'inquiètent de voir les Investissements Directs Etrangers en France diminuer (lien) et de l'autre s'inquiètent des rachats d'entreprises européennes. Il est rigoureusement impossible de les satisfaire, les deux vont de concert. Bien sûr, au niveau macro, il est important de ne pas avoir de trop fort déséquilibre de balances courantes. Mais ce n'est pas le cas (lien). A vrai dire on a plutôt le problème inverse, la demande intérieure étant si faible dans la zone euro que nos riches préfèrent investir à l'étranger par manque d'opportunité d'investissement. Comme l'Allemagne l'a fait avec le sud de l'Europe dans les années 2000.
3) Une baisse des parts de marché était toujours une mauvaise chose. Avec la montée en puissance des émergents, c'est évident que la part européenne du PIB mondial baissera. Enfin, on peut transférer des spécialisations sectorielles vers des pays émergents (la part de marché européenne dans l'industrie du textile est probablement proche de zéro), et gagner des parts de marché dans d'autres secteurs. High-tech n'est pas toujours synonyme de productivité élevée (voir mon post précédent où l'on voit que l'industrie des composants électroniques a une assez faible productivité par travailleur, par rapport à la chimie ou la pharmacie). Ce n'est forcément dans ce secteur qu'il est rentable pour l'Europe de se spécialiser.
4) Personne ne faisait le lien entre déficit commercial et investissements étrangers. Prenez le cas de l'Australie par exemple, où les asiatiques investissent chaque année des sommes faramineuses pour s'offrir des maisons de vacances. Cet argent sert à financer le déficit commercial de l'Australie. Mais ce n'est pas pour autant que l'Australie "vit au dessus de ses moyens", elle est dans le business de vendre un cadre de vie à des retraités chinois. Entre autres. C'est d'ailleurs probablement plus soutenable à long terme que l'économie emiratie, qui consiste à vendre du pétrole pour financer son déficit commercial. Les plages australiennes seront toujours là, elles, et l'économie australienne est plus diversifiée.
En revanche, la faible part des dépenses de R&D mentionnée dans l'article est plus inquiétante. Ce qui est bien, c'est qu'à partir de septembre 2014 (et mai 2014 pour la France), les comptes nationaux européens compteront les dépenses de R&D dans la formation de capital des entreprises (c'était une consommation intermédiaire auparavant). Les Etats Unis l'ont fait l'automne dernier, les normes comptables internationales ayant changé récemment. Cela contribuera directement au PIB dans l'approche demande, mais surtout, permettra de comparer facilement des séries longues de R&D par secteur dans tous les pays du monde.
Can't wait.
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